Destruction de déclarations d’impôts : la réaction des professionnels des archives

A l’occasion de l’émoi soulevé récemment par la destruction de déclarations d’impôts de
personnalités, l’Association des archivistes français tient à rappeler que l’élimination de ces
documents ne relève pas d’un simple hasard mais semble être la conséquence de la non application
et sans doute de la méconnaissance complète des dispositions législatives et réglementaires (livre II
du Code du patrimoine, décret n° 79-1037 du 3 décembre 1979). Ces textes sont, entre autres,
destinés à éviter la destruction intempestive des documents nécessaires à l’action des autorités
publiques et à la justification du droit des citoyens, sans préjuger de leur éventuel intérêt historique.

vendredi 18 mars 2005
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En France les archi­ves publi­ques ne peu­vent être léga­le­ment éliminées sans visa préa­la­ble de l’admi­nis­tra­tion des archi­ves. L’arti­cle L 212-3 du Code du patri­moine pres­crit en effet que « la liste des docu­ments des­ti­nés à l’élimination ainsi que les condi­tions de leur élimination sont fixées en accord entre l’auto­rité qui les a pro­duits ou reçus et l’admi­nis­tra­tion des archi­ves ». Cette dis­po­si­tion est com­plé­tée par l’arti­cle 16 du décret n° 79-1037 du 3 décem­bre 1979 qui indi­que que « lors­que les ser­vi­ces [...] dési­rent
éliminer les docu­ments qu’ils jugent inu­ti­les, ils en sou­met­tent la liste au visa de la direc­tion des Archives de France. Toute élimination est inter­dite sans ce visa »

Cette dis­po­si­tion n’est pas des­ti­née à sur­char­ger l’admi­nis­tra­tion de res­pon­sa­bi­li­tés
sup­plé­men­tai­res, enca­drées par des textes abs­cons. Elle vise sim­ple­ment, par une pro­cé­dure par­ta­gée, voire contra­dic­toire, à assu­rer « la conser­va­tion des archi­ves [...] dans l’inté­rêt public tant pour les besoins de la ges­tion et de la jus­ti­fi­ca­tion des droits des per­son­nes phy­si­ques ou mora­les, publi­ques ou pri­vées, que pour la docu­men­ta­tion his­to­ri­que de la recher­che » (arti­cle L 211-2 du Code du Patrimoine).

Bien appli­quée, cette pro­cé­dure est une des garan­ties d’un fonc­tion­ne­ment trans­pa­rent et démo­cra­ti­que de nos ins­ti­tu­tions, loin de tout arbi­traire indi­vi­duel. Elle assure également une saine ges­tion des moyens publics, en n’éliminant pas des docu­ments utiles, en ne conser­vant pas des docu­ments inu­ti­les.

Force est tou­te­fois de cons­ta­ter que l’admi­nis­tra­tion fran­çaise n’a pas tou­jours eu la volonté et ne s’est pas tou­jours dotée des moyens d’assu­rer une cor­recte ges­tion de ses archi­ves cou­ran­tes, avant même que celles-ci cons­ti­tuent une des sour­ces de l’écriture de l’his­toire.

Cette mal­heu­reuse affaire est l’occa­sion de rap­pe­ler une fois encore que l’ensem­ble des
docu­ments pro­duits et reçus par les admi­nis­tra­tions ne sont pas leur pro­priété - et encore moins celle des agents publics - mais celle de la Nation toute entière.

Sans vou­loir acca­bler un agent en par­ti­cu­lier, les archi­vis­tes - et tout par­ti­cu­liè­re­ment les
archi­vis­tes publics - tien­nent à rap­pe­ler la loi et les sanc­tions péna­les qui décou­lent de sa non appli­ca­tion : « Le fait, par une per­sonne dépo­si­taire de l’auto­rité publi­que ou char­gée d’une mis­sion de ser­vice public, un comp­ta­ble public, un dépo­si­taire public ou l’un de ses subor­don­nés, de détruire, détour­ner ou sous­traire un acte ou un titre, ou des fonds publics ou privés, ou effets, pièces ou titres en tenant lieu, ou tout autre objet qui lui a été remis en raison de ses fonc­tions ou de sa mis­sion, est puni de dix ans d’empri­son­ne­ment et de 150 000 euros d’amende. La ten­ta­tive du délit prévu à l’alinéa qui pré­cède est punie
des mêmes peines. » (Code pénal, art. 432-15).

CONTACT PRESSE : Association des Archivistes Français. TEL : 01 46 06 39 44

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