La Gazette des archives n° 266 (2022-2)

Les archives de l’enfance

Rédaction de la Gazette des archives   mardi 12 septembre 2023
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Si l’enfance est un objet d’archi­ves, notam­ment à tra­vers celles pro­dui­tes dans le cadre des poli­ti­ques publi­ques por­tant sur l’éducation, la pro­tec­tion ou encore l’adop­tion, les enfants en sont aussi sujet depuis la cons­ti­tu­tion de dos­siers jusqu’à la valo­ri­sa­tion auprès d’eux et de publics adul­tes de docu­ments les concer­nant.
À tra­vers seize contri­bu­tions émanant d’archi­vis­tes et d’his­to­rien·­ne·s, ce numéro de La Gazette des archi­ves entend embras­ser le plus lar­ge­ment pos­si­ble la ques­tion des archi­ves de l’enfance. Ces arti­cles per­met­tent de nour­rir la réflexion archi­vis­ti­que autour de trois grands axes : archi­ver l’enfance, retrou­ver l’enfance au tra­vers des archi­ves, et uti­li­ser celles-ci comme outils mêmes de la pro­tec­tion de l’enfance.

Ce numéro a été coor­donné par Hélène Guichard-Spica, Viviane Frings-Hessami et Lydie Porée, avec le sou­tien de Lydiane Gueit-Montchal.


SOMMAIRE

Archiver l’enfance

 Archiver l’Aide Sociale à l’Enfance : retour sur une ébauche de stra­té­gie pour les Yvelines, par Constance DE TOURNADRE

 Mise en place d’une poli­ti­que de col­lecte des archi­ves des établissements sco­lai­res du pre­mier degré en Ille-et-Vilaine. Aspects métho­do­lo­gi­ques, par Sandra GROSCLAUDE

 Le fonds CIDEF : une his­toire riche en péri­pé­ties, par Damien HAMARD

 La col­lecte en cours des archi­ves de la pro­tec­tion judi­ciaire de la jeu­nesse en Ille-et-Vilaine : cons­tats, décou­ver­tes et pistes de tra­vail, par Mathilde PINTAULT

 L’enfance der­rière les bar­reaux dans le dépar­te­ment du Morbihan, par Marie GÉRAUD

Enfance et enfants au tra­vers des archi­ves

 L’enfant, les archi­ves de l’enfance et les pro­duc­tions enfan­ti­nes : une reconnais­sance pro­gres­sive, par Coline BRIGNON

 De l’objet au sujet. Les traces des enfants et des ado­les­cents dans les fonds des Archives muni­ci­pa­les de Lyon, par Louis FAIVRE D’ACIER

 Jeunes et his­toi­res, his­toi­res de jeunes. Retour sur une expé­rience auprès d’un public sco­laire empê­ché, par Sophie EHOUARNE, Catherine DOLGHIN, Christine CORMAND et Céline ROGE

 Les enfants aux Archives : quel­les média­tions avec le numé­ri­que ?, par Mathilde DEUVE et Hélène GUICHARD-SPICA

 Exposer l’enfance, par Alexandre CHEVAILLIER

 Enseigner l’his­toire des archi­ves au tra­vers des docu­ments de l’enfance, par Elisabeth C. MACKNIGHT

Des archi­ves pour pro­té­ger l’enfance

 Les archi­ves de l’adop­tion inter­na­tio­nale, par Cécile LOMBARD, Christine MARTINEZ, Véronique PARMENTIER et Michel THIBAULT

 Archives de l’enfance : le projet MIRRA (Mémoire-Identité-Droit aux archi­ves-Accès), par Elizabeth SHEPHERD, Anna SEXTON, Elizabeth LOMAS et Peter WILLIAMS

 Les vio­len­ces sexuel­les sur mineurs dans l’Église : l’enquête de la Commission indé­pen­dante sur les abus sexuels, par Philippe PORTIER, Paul AIRIAU, Thomas BOULLU et Anne LANCIEN

 Panser la ges­tion des dos­siers pour penser la pro­tec­tion de l’enfance ? Les enjeux d’une réflexion archi­vis­ti­que qui replace l’humain au centre, par Adélaïde LALOUX

 De la consul­ta­tion des dos­siers ins­ti­tu­tion­nels au par­tage de ses don­nées per­son­nel­les : les archi­ves dans le droit aux ori­gi­nes pour les enfants aban­don­nés et adop­tés aujourd’hui, par Julie VÉDRINES

RÉSUMÉ DES ARTICLES

Archiver l’enfance

 Archiver l’Aide Sociale à l’Enfance : retour sur une ébauche de stra­té­gie pour les Yvelines, par Constance DE TOURNADRE
Cet arti­cle offre un compte rendu d’un tra­vail sol­li­cité par les Archives dépar­te­men­ta­les des Yvelines (AD 78) dans le cadre du stage de spé­cia­lité à l’Institut natio­nal du patri­moine. La com­mande était de pro­po­ser une stra­té­gie d’archi­vage papier et numé­ri­que de la fonc­tion d’Aide Sociale à l’Enfance (ASE) dans les Yvelines, en par­tant de l’iden­ti­fi­ca­tion des pro­duc­teurs, puis docu­ments, don­nées et méta­don­nées. Concrètement, était attendu d’abord un bilan de la col­lecte des AD 78 dans le domaine de la pro­tec­tion de l’enfance en géné­ral, afin de faci­li­ter et guider le tra­vail futur du ser­vice, notam­ment par des sug­ges­tions de prio­ri­tés et de réé­va­lua­tions. Ce bilan pros­pec­tif devait être suivi d’une pro­po­si­tion de stra­té­gie pour le déploie­ment de la déma­té­ria­li­sa­tion glo­bale et sécu­ri­sée du dis­po­si­tif d’ASE seul, et en par­ti­cu­lier des dos­siers d’enfants pro­té­gés. Après avoir pré­senté le contexte et les rai­sons jus­ti­fiant cette com­mande à deux échelles, l’arti­cle s’atta­che à décrire la démar­che adop­tée pour y répon­dre en deux temps. Il pré­sente ensuite, pour cha­cune de ces étapes du tra­vail, les prin­ci­paux résul­tats obte­nus ainsi que les pré­co­ni­sa­tions sou­mi­ses aux archi­vis­tes comme aux métiers pour per­met­tre la mise en œuvre d’une col­lecte et d’un archi­vage cohé­rents des domai­nes concer­nés dans un contexte déma­té­ria­lisé.

 Mise en place d’une poli­ti­que de col­lecte des archi­ves des établissements sco­lai­res du pre­mier degré en Ille-et-Vilaine. Aspects métho­do­lo­gi­ques, par Sandra GROSCLAUDE
S’inté­res­ser aux archi­ves des établissements sco­lai­res d’un dépar­te­ment s’ins­crit dans une démar­che qui revêt plu­sieurs enjeux. Les col­lec­ter permet à la fois d’écrire l’his­toire de l’éducation, et de sécu­ri­ser des infor­ma­tions à valeur pro­bante. Pour répon­dre à ces enjeux, établir une métho­do­lo­gie (et donc une poli­ti­que de col­lecte) est apparu aux Archives dépar­te­men­ta­les d’Ille-et-Vilaine comme néces­saire. En pas­sant par un état des lieux des fonds pré­sents, par la défi­ni­tion du péri­mè­tre de col­lecte, par les recher­ches de retours d’expé­rien­ces et les pre­miè­res réflexions, cet arti­cle retrace la genèse d’un projet tou­chant aux archi­ves de l’enfance et qui est tou­jours en cours. Sa mise en œuvre ainsi que les pre­miers retours des établissements sco­lai­res contri­buent à pren­dre la mesure de l’enver­gure d’un tel chan­tier mais également l’impor­tance d’un des rôles fon­da­men­taux de l’archi­viste : le conseil et l’accom­pa­gne­ment des ser­vi­ces pro­duc­teurs d’archi­ves publi­ques.

 Le fonds CIDEF : une his­toire riche en péri­pé­ties, par Damien HAMARD
Le fonds CIDEF, en rejoi­gnant les maga­sins de la biblio­thè­que uni­ver­si­taire de l’uni­ver­sité d’Angers, ren­force quan­ti­ta­ti­ve­ment et qua­li­ta­ti­ve­ment les fonds du centre d’archi­ves spé­cia­li­sés qui vient d’ouvrir. Pourtant, quel­ques années plus tard, la redé­cou­verte d’une partie des docu­ments sur un autre campus ange­vin indi­que que l’inté­rêt ini­tial pour le fonds s’est ame­nuisé. L’arti­cle revient sur l’his­toire du fonds d’archi­ves, tout en pré­sen­tant les prin­ci­pa­les typo­lo­gies docu­men­tai­res acces­si­bles pour le cher­cheur, avant de démon­trer com­ment la fron­tière est par­fois ténue entre désin­té­rêt fac­tuel et mise en lumière.

 La col­lecte en cours des archi­ves de la pro­tec­tion judi­ciaire de la jeu­nesse en Ille-et-Vilaine : cons­tats, décou­ver­tes et pistes de tra­vail, par Mathilde PINTAULT
Depuis le prin­temps 2021, les Archives dépar­te­men­ta­les d’Ille-et-Vilaine mènent une poli­ti­que active de col­lecte auprès des ser­vi­ces de la pro­tec­tion judi­ciaire de la jeu­nesse. Au cours de ces 18 mois de tra­vail, plu­sieurs axes se sont déga­gés : un fort besoin d’accom­pa­gne­ment des ser­vi­ces pro­duc­teurs pour leur per­met­tre d’effec­tuer un archi­vage cou­rant et inter­mé­diaire effi­cace ; la néces­sité de pro­cé­der à l’évaluation sys­té­ma­ti­que des dos­siers indi­vi­duels avant leur col­lecte et de ne pas la déconnec­ter de col­lec­tes satel­li­tes (juri­dic­tions pour mineurs notam­ment) ; l’impor­tance de col­lec­ter d’autres docu­ments, ceux qui font enten­dre la voix des enfants et ado­les­cents, et qui racontent l’his­toire du groupe.

 L’enfance der­rière les bar­reaux dans le dépar­te­ment du Morbihan, par Marie GÉRAUD
Cet arti­cle offre une vision des mis­sions de l’archi­viste à tra­vers la thé­ma­ti­que de l’enfance délin­quante. Il aborde des ques­tion­ne­ments actuels sur la col­lecte : la sélec­tion qui doit s’adap­ter aux lacu­nes et aux par­ti­cu­la­ri­tés de chaque ter­ri­toire, la dif­fi­culté de mettre en œuvre la col­lecte de don­nées numé­ri­ques dans les tri­bu­naux, notam­ment pour les archi­ves indis­pen­sa­bles à la recher­che que sont les regis­tres, mais aussi la dif­fi­culté pour retrou­ver des archi­ves pri­vées des congré­ga­tions reli­gieu­ses qui avaient pour­tant une mis­sion de ser­vice public avant l’heure. S’agis­sant du clas­se­ment se pose la ques­tion du res­pect des fonds dans le cas de l’uni­cité d’un fonds dont le pro­duc­teur n’avait pas de logi­que de clas­se­ment mais aussi celle de la rédac­tion de bases de don­nées à l’heure du règle­ment géné­ral sur la pro­tec­tion des don­nées. En ce qui concerne les sour­ces, l’inté­rêt est porté dans cet arti­cle sur les bases de don­nées d’ins­ti­tu­tions natio­na­les par­fois méconnues. Enfin est évoquée la manière dont l’archi­viste s’intè­gre dans des pro­jets scien­ti­fi­ques et des opé­ra­tions de valo­ri­sa­tion face à un sujet très média­tisé qui inté­resse
de nom­breux par­te­nai­res.

Enfance et enfants au tra­vers des archi­ves

 L’enfant, les archi­ves de l’enfance et les pro­duc­tions enfan­ti­nes : une reconnais­sance pro­gres­sive, par Coline BRIGNON
L’enfant est de nos jours une per­sonne à part entière. Sa parole, ses désirs, et son épanouissement sont les préoc­cu­pa­tions pre­miè­res de ses parents et des ins­ti­tu­tions qui l’enca­drent. Or, l’enfant n’a pas tou­jours eu cette place dans la société. Cet arti­cle est voué à étudier cette reconnais­sance pro­gres­sive de l’enfant à tra­vers la place qu’il peut avoir, ainsi que ses docu­ments, dans les ser­vi­ces d’archi­ves. En effet, avec l’évolution de sa prise en consi­dé­ra­tion par la famille et l’État, une masse docu­men­taire en lien avec l’enfant est appa­rue. Il devient un sujet fon­da­men­tal pour cer­tai­nes ins­ti­tu­tions comme l’école. Les poli­ti­ques d’archi­vage ont donc dû s’adap­ter et pren­dre en charge de nou­vel­les sour­ces. Les ser­vi­ces d’archi­ves ont également dû comp­ter l’enfant parmi leur public et appren­dre à lui dédier des ser­vi­ces. Toutefois, la ques­tion de la prise en consi­dé­ra­tion de sa parole reste com­plexe à tra­vers l’exem­ple des archi­ves. Les archi­ves pro­dui­tes par la main de l’enfant peu­vent être pré­sen­tes dans les dos­siers des ins­ti­tu­tions ou des famil­les, mais qu’en est-il de leur trai­te­ment et visi­bi­lité ?

 De l’objet au sujet. Les traces des enfants et des ado­les­cents dans les fonds des Archives muni­ci­pa­les de Lyon, par Louis FAIVRE D’ACIER
Trois points de vue dis­tincts peu­vent être rete­nus pour abor­der la ques­tion de l’enfance dans les archi­ves de la ville de Lyon. Ces points de vue trans­cen­dent les fonds mais reflè­tent dif­fé­ren­tes pos­tu­res de la part des ins­ti­tu­tions, et des enfants concer­nés. Certaines archi­ves ren­sei­gnent leur lec­teur sur la conduite des poli­ti­ques publi­ques de l’enfance, dans leurs dif­fé­ren­tes décli­nai­sons. D’autres, les plus volu­mi­neu­ses, pré­sen­tent des enfants en tant qu’objet de soin, d’éducation, de prise en charge. D’autres enfin, les plus rares, don­nent à voir ou à enten­dre des mineurs. Les Archives muni­ci­pa­les de Lyon offrent ainsi un large panel de sour­ces sur l’enfance, com­plé­men­tai­res d’archi­ves issues d’ins­ti­tu­tions spé­cia­li­sées. Pour la période contem­po­raine, le défi du numé­ri­que est par­ti­cu­liè­re­ment sen­si­ble, compte tenu des enjeux de pro­tec­tion de l’enfance, et cons­ti­tue à plus d’un titre une remise en ques­tion pas­sion­nante.

 Jeunes et his­toi­res, his­toi­res de jeunes. Retour sur une expé­rience auprès d’un public sco­laire empê­ché, par Sophie EHOUARNE, Catherine DOLGHIN, Christine CORMAND et Céline ROGE
Depuis de nom­breu­ses années, les média­tri­ces des ser­vi­ces des Archives dépar­te­men­ta­les des Côtes-d’Armor et des Archives muni­ci­pa­les de Saint-Brieuc, en col­la­bo­ra­tion avec la pro­fes­seure des écoles et de l’éducatrice pour jeunes enfants du centre hos­pi­ta­lier, orga­ni­sent des ani­ma­tions péda­go­gi­ques et cultu­rel­les dans la salle de classe des ser­vi­ces pédia­tri­ques de l’hôpi­tal Yves-Le-Foll de Saint-Brieuc. Les média­tri­ces sont ainsi ame­nées à cons­truire des séan­ces ori­gi­na­les pour un jeune public éloigné dans le cadre par­ti­cu­lier du monde hos­pi­ta­lier. Des séan­ces qui s’avè­rent au final très for­ma­tri­ces à titre pro­fes­sion­nel mais aussi per­son­nel.

 Les enfants aux Archives : quel­les média­tions avec le numé­ri­que ?, par Mathilde DEUVE et Hélène GUICHARD-SPICA
Lorsque l’on parle de média­tion dans les archi­ves, la place de l’enfant est grande : il s’agit essen­tiel­le­ment des élèves, qua­li­fiés sous le terme de « public sco­laire ». L’offre péda­go­gi­que est sans conteste forte, cepen­dant, elle a été lar­ge­ment renou­ve­lée ces der­niè­res années par le déve­lop­pe­ment tou­jours plus pré­gnant du numé­ri­que. Au tra­vers du retour d’expé­rience des Archives dépar­te­men­ta­les des Yvelines et de son appro­che de la média­tion numé­ri­que auprès des enfants sur près d’une ving­taine d’années, il convient de s’inter­ro­ger sur les muta­tions des usages numé­ri­ques, de la cons­truc­tion de connais­san­ces et sur de nou­vel­les capa­ci­tés à expé­ri­men­ter et par­ta­ger des savoirs.

  Exposer l’enfance, par Alexandre CHEVAILLIER
L’his­to­rio­gra­phie de l’enfance est née sous la plume de Philippe Ariès. Depuis la fin du XXe siècle, cette science moderne a connu une évolution ful­gu­rante. La reconnais­sance du statut de l’enfant et les muta­tions de la famille au fil des siè­cles ont engagé à déve­lop­per une véri­ta­ble poli­ti­que de la pro­tec­tion de l’enfance. En la matière, la Meurthe-et-Moselle est pion­nière dès le XIXe siècle grâce à l’impli­ca­tion de méde­cins dévoués à la cause infan­tile. Dans un contexte de moder­ni­sa­tion des lois sur la pro­tec­tion de l’enfance, le Conseil dépar­te­men­tal de Meurthe-et-Moselle a sou­haité réa­li­ser une expo­si­tion dédiée au monde de l’enfance, pré­sen­tée à partir de février 2008. Ce tra­vail de valo­ri­sa­tion a su rete­nir l’atten­tion au sein du ter­ri­toire. En por­tant un regard rétros­pec­tif, le bilan reste tou­te­fois mitigé en termes d’enri­chis­se­ment des fonds privés de l’enfance et d’exploi­ta­tion à des fins scien­ti­fi­ques. L’inté­rêt du grand public pour la généa­lo­gie permet quant à lui de mettre plei­ne­ment en lumière le contenu de l’expo­si­tion, avec une sol­li­ci­ta­tion plus pré­gnante sur les ques­tions des enfants aban­don­nés. Aujourd’hui encore, des opé­ra­tions de trai­te­ment d’archi­ves entrent en réso­nance avec l’expo­si­tion « Enfance », qui fête en 2023 ses quinze ans.

 Enseigner l’his­toire des archi­ves au tra­vers des docu­ments de l’enfance, par Elisabeth C. MACKNIGHT
À tra­vers l’étude de docu­ments de l’enfance pro­ve­nant d’archi­ves pri­vées, une his­to­rienne d’ori­gine aus­tra­lienne pro­pose une réflexion sur l’his­toire des archi­ves aux étudiants écossais en cours magis­tral d’his­toire à la faculté. Cet arti­cle montre que le tra­vail des his­to­riens sur les sour­ces docu­men­tai­res est un sujet qui sus­cite beau­coup d’inté­rêt chez les jeunes. Mais, en paral­lèle, le tra­vail des archi­vis­tes reste mas­si­ve­ment inconnu. Une intro­duc­tion aux codes, termes, et concepts du métier se révé­le­rait essen­tielle. Les étudiants s’inter­ro­gent sur la pré­ser­va­tion et la des­truc­tion des archi­ves, le droit à l’accès, la pré­sence des objets dans les fonds, et les regards des adul­tes sur le vécu enfan­tin.

Des archi­ves pour pro­té­ger l’enfance

 Les archi­ves de l’adop­tion inter­na­tio­nale, par Cécile LOMBARD, Christine MARTINEZ, Véronique PARMENTIER et Michel THIBAULT
Depuis 2020, Archivistes sans fron­tiè­res – Section France a été suc­ces­si­ve­ment sol­li­ci­tée par les auto­ri­tés char­gées de l’adop­tion inter­na­tio­nale en Éthiopie, au Sénégal, puis en Côte d’Ivoire, afin d’inter­ve­nir en vue de la sau­ve­garde des dos­siers d’adop­tion. Dans un contexte admi­nis­tra­tif et juri­di­que éminemment varia­ble d’un pays à l’autre, il s’agit à chaque fois de garan­tir la conser­va­tion de ces dos­siers et leur com­mu­ni­ca­tion aux ayants droit, et en défi­ni­tive de garan­tir le droit des adop­tés à connaî­tre leurs ori­gi­nes, confor­mé­ment au prin­cipe posé par l’arti­cle 30 de la Convention de La Haye de 1993. Les inter­ven­tions d’AsF-France s’ins­cri­vent dans le cadre de l’action menée par la Mission de l’adop­tion inter­na­tio­nale du minis­tère fran­çais de l’Europe et des Affaires étrangères et par le Service social inter­na­tio­nal France, tout par­ti­cu­liè­re­ment le projet RACINE, qui consiste à accom­pa­gner les adop­tés dans la recher­che de leurs ori­gi­nes. Elles répon­dent également aux prio­ri­tés défi­nies par la Section sur le Archives et les Droits de l’Homme du Conseil inter­na­tio­nal des archi­ves, dans son pro­gramme d’actions 2021-2024, en faveur de l’accès aux docu­ments d’iden­tité et de la défense des droits des enfants.

 Archives de l’enfance : le projet MIRRA (Mémoire-Identité-Droit aux archi­ves-Accès), par Elizabeth SHEPHERD, Anna SEXTON, Elizabeth LOMAS et Peter WILLIAMS – arti­cle dis­po­ni­ble en langue ori­gi­nale (anglais) et tra­duit en fran­çais par Laura CHARDAR.
Les enfants et les jeunes vivant en dehors du foyer fami­lial, par exem­ple en famille d’accueil, dans des foyers ou dans d’autres struc­tu­res d’accueil, pris en charge par les auto­ri­tés loca­les ou par des asso­cia­tions pour enfants, souf­frent sou­vent, tout au long de leur vie, de réper­cus­sions sur leur bien-être, leur sen­ti­ment d’appar­te­nance et d’iden­tité et leur per­cep­tion d’eux-mêmes. Les per­son­nes ayant été dans cette situa­tion peu­vent être pri­vées de récits fami­liaux, en par­ti­cu­lier lors­que leur expé­rience a été com­plexe, bou­le­ver­sée ou trau­ma­ti­sante. La vie des enfants pris en charge est docu­men­tée par les tra­vailleurs sociaux, les famil­les d’accueil et d’autres per­son­nes dans des « dos­siers de prise en charge ». La lit­té­ra­ture dans les domai­nes du tra­vail social et des études archi­vis­ti­ques sug­gère que ce qui est écrit sur les enfants et les jeunes dans les dos­siers de l’aide sociale à l’enfance peut avoir un impact signi­fi­ca­tif sur leur vie, alors qu’ils ne sont pas tou­jours capa­bles de répon­dre aux ques­tions les plus élémentaires, comme « pour­quoi ai-je été placé(e) ? ». Le projet MIRRA (Mémoire-Identité-Droit aux archi­ves-Accès) est un projet de recher­che par­ti­ci­pa­tif mené au sein du dépar­te­ment des études de l’infor­ma­tion de l’University College de Londres (UCL), qui étudie l’expé­rience des anciens enfants placés cher­chant à obte­nir leur dos­sier en Angleterre, mais les droits des anciens enfants placés concer­nant l’accès à leur dos­sier sont également étudiés dans de nom­breux autres pays, notam­ment en Australie et au Canada.

 Les vio­len­ces sexuel­les sur mineurs dans l’Église : l’enquête de la Commission indé­pen­dante sur les abus sexuels, par Philippe PORTIER, Paul AIRIAU, Thomas BOULLU et Anne LANCIEN
Cet arti­cle revient de façon détaillée sur les diver­ses sour­ces consul­tées et sur la métho­do­lo­gie suivie par l’équipe de recher­che socio-his­to­ri­que de la Commission indé­pen­dante sur les abus sexuels dans l’Église de France : archi­ves publi­ques et archi­ves de l’Église de France ; presse, témoi­gna­ges, comp­tes géné­raux de la jus­tice. Sont également expo­sées les prin­ci­pa­les don­nées tirées de ces sour­ces concer­nant les mineurs abusés. Si les vic­ti­mes sont sou­vent absen­tes des dos­siers consul­tés dans les archi­ves jusqu’aux années 1990, le groupe de recher­ches socio-his­to­ri­ques est malgré tout par­venu à iden­ti­fier nombre de carac­té­ris­ti­ques les concer­nant, préa­la­ble­ment à cette décen­nie, en croi­sant les infor­ma­tions et les sour­ces dis­po­ni­bles.

 Panser la ges­tion des dos­siers pour penser la pro­tec­tion de l’enfance ? Les enjeux d’une réflexion archi­vis­ti­que qui replace l’humain au centre, par Adélaïde LALOUX
L’écoute des anciens de la pro­tec­tion de l’enfance permet de cons­ta­ter à quel point les archi­ves qui les concer­nent peu­vent être cons­ti­tu­ti­ves d’une iden­tité et por­teu­ses d’un lien tout à fait par­ti­cu­lier. Marie-Christine, au cours de sa quête, reven­di­que une forme de pro­priété de ces docu­ments qu’elle consi­dère comme privés : « Ce sont des his­toi­res per­son­nel­les, ce sont des vies, on donne, on ne garde pas pour soi la vie de quelqu’un d’autre. » Les dif­fi­cultés d’accès à ces dos­siers jus­ti­fient et néces­si­tent une réflexion archi­vis­ti­que spé­ci­fi­que pour par­ve­nir à une consul­ta­tion de ces archi­ves qui réponde mieux aux besoins des anciens de la pro­tec­tion de l’enfance.

 De la consul­ta­tion des dos­siers ins­ti­tu­tion­nels au par­tage de ses don­nées per­son­nel­les : les archi­ves dans le droit aux ori­gi­nes pour les enfants aban­don­nés et adop­tés aujourd’hui, par Julie VÉDRINES
Si l’impor­tance d’avoir une trace des enfants aban­don­nés met du temps à se mettre en place, en France, jusqu’à la seconde moitié du XIXe siècle, le recueil d’infor­ma­tions concer­nant ces enfants est aujourd’hui régle­menté et obli­ga­toire. À tra­vers les dos­siers d’hôpi­taux et de l’Aide Sociale à l’Enfance, enca­drés par le Conseil natio­nal pour l’accès aux ori­gi­nes, ces enfants peu­vent désor­mais accé­der à leurs ori­gi­nes. Cependant, les résul­tats ne sont pas tou­jours à la hau­teur de leurs atten­tes et la cons­truc­tion iden­ti­taire s’avère dif­fi­cile. Les per­son­nes aban­don­nées et adop­tées en quête de leur his­toire n’hési­tent donc pas à faire usage de leurs don­nées per­son­nel­les en uti­li­sant les réseaux sociaux ou en se pro­cu­rant des tests ADN. Leur sen­si­bi­lité accrue à l’his­toire et aux sour­ces les pousse par­fois à deve­nir elles-mêmes des pro­duc­tri­ces d’archi­ves dans le but de lais­ser une trace de leur exis­tence et de remet­tre la main sur une his­toire qui ne leur est pas tou­jours acces­si­ble. La poli­ti­que archi­vis­ti­que et les acteurs de l’archi­vage (ser­vi­ces pro­duc­teurs et archi­vis­tes) jouent ainsi des rôles non négli­gea­bles dans l’appro­pria­tion et les répon­ses dont ont besoin les enfants aban­don­nés et adop­tés.

Deuxième numéro de l’abonnement 2022
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