La Gazette des archives

N°268 Publication

Autour de la guerre. Les archives, de précieuses alliées

n°268 (2022-4)

Guerre

Information légales :

Quatrième numéro de l’abonnement 2022
ISSN : 0016-5522
Les frais d'expédition seront automatiquement calculés en fonction du poids du colis, lors de la dernière étape du processus de commande en ligne.

Ce tarif est réservé aux achats en France métropolitaine. Pour un achat en Outre mer ou à l’étranger, merci de nous contacter à secretariat@archivistes.org car le tarif et le montant des frais de port ne sont pas les mêmes.

« Autour de la guerre. Les archives, de précieuses alliées » est un numéro de La Gazette des archives qui s’adresse à des professionnels de la gestion de l’information, ainsi qu’aux producteurs en amont et aux utilisateurs en aval. Les articles sont également destinés à un plus large public afin de rendre visibles nos professions, d’en expliquer les tenants et les aboutissants et, qui sait, peut-être susciter des vocations…


Pour un sujet tel que la guerre, les archives s’avèrent être de précieuses alliées. Elles jouent un rôle indispensable dans la compréhension du passé, de l’acceptation du présent et de la construction de l’avenir. Elles couvrent un large spectre et ne se limitent pas à des informations de terrain. Si les archives souffrent, elles font l’objet de sauvetage et de mise en valeur. Sensibles, parfois douloureuses, elles reflètent tant les faces visibles que cachées de ces périodes sombres. Collecte, classement, conservation et communication des archives exigent un ensemble de gestes archivistiques, une parfaite connaissance du contenu et du contexte des documents, un travail d’équipe et de collaboration, ainsi que l’application des règles et des normes en vigueur du point de vue juridique et technique.


Des archivistes, gestionnaires de l’information et historiens provenant d’horizons très divers éclairent des aspects propres à la thématique de la guerre – sujet toujours d’une actualité brûlante – en France et au-delà de nos frontières.

Ce numéro a été piloté par Barbara Viallet, administratrice chargée de la conservation et du sort final des documents au sein des Archives de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN).

SOMMAIRE

Des archi­ves mal­me­nées : dépla­ce­ments, des­truc­tion, recons­ti­tu­tion
 Le repli des archi­ves de Pechiney pen­dant la Seconde Guerre mon­diale, par Jenny PIQUET
 Archives audio­vi­suel­les et pro­tec­tion du patri­moine cultu­rel en cas de conflit armé, par Sophie FTULISIAK et le lieu­te­nant Charlélie BERTHAUT
 Deliberate des­truc­tion and col­la­te­ral damage : the bur­ning of Irish records 1916-1922, par le doc­teur Ciarán WALLACE

Des archi­ves pour témoi­gner : droits indi­vi­duels et mémoire col­lec­tive
 Archives indi­vi­duel­les des vic­ti­mes de guerre de la Seconde Guerre mon­diale : de la reconnais­sance des droits à la valo­ri­sa­tion mémo­rielle et his­to­ri­que. Plongée dans le fonds de la divi­sion des archi­ves des vic­ti­mes des conflits contem­po­rains, par Alain ALEXANDRA
 L’agent orange, agent de dis­corde, par Marcelle CINQ-MARS
 Archiving vio­lence : a conver­sa­tion with Luisa Franco, par Luisa FRANCO et le doc­teur Tobias HAGMANN
 “An unex­pec­ted chal­lenge” : how The Guardian repor­ted the Falklands war, par Richard NELSSON

Des archi­ves à trai­ter : gestes archi­vis­ti­ques
 Les pro­ces­sus de pro­duc­tion et de ges­tion de l’infor­ma­tion (papier et électronique) dans des contex­tes sin­gu­liers : le cas aty­pi­que des unités de la gen­dar­me­rie pré­vô­tale, par la lieu­te­nante-colo­nelle Sandra SÉRIS avec la col­la­bo­ra­tion d’Éric WARNANT
 Accès inter­dit : la trans­pa­rence gou­ver­ne­men­tale et les embû­ches à l’accès à l’infor­ma­tion. Les cas des archi­ves cana­dien­nes de rela­tions inter­na­tio­na­les et du ren­sei­gne­ment étranger, par Melody BÉLAND
 Archivistes de l’OTAN, affir­ma­tion d’une iden­tité pro­fes­sion­nelle au cœur des opé­ra­tions de l’Alliance atlan­ti­que, par Barbara VIALLET
 U.S. Cold War Espionage Satellites, Public Disclosure, and Digital Archives, par Jeffery CHARLSTON

RÉSUMÉ DES ARTICLES

Des archi­ves mal­me­nées : dépla­ce­ments, des­truc­tion, recons­ti­tu­tion
 Le repli des archi­ves de Pechiney pen­dant la Seconde Guerre mon­diale, par Jenny PIQUET
En jan­vier 1940, alors que les pers­pec­ti­ves d’une offen­sive des armées alle­man­des se pré­ci­sent, la direc­tion géné­rale de la com­pa­gnie des pro­duits chi­mi­ques et électrométallurgiques Alais, Froges et Camargue (AFC), qui devien­dra Pechiney en 1950, pré­pare le départ de Paris de son admi­nis­tra­tion cen­trale située rue Balzac. Pour accueillir l’ensem­ble de ses ser­vi­ces, son choix s’est porté sur le domaine d’Éguilles, dans la com­mune de Vedène (Vaucluse), à quel­ques kilo­mè­tres d’Avignon. En l’espace de quel­ques mois, le site est orga­nisé pour accueillir près de 650 col­la­bo­ra­teurs et leur famille. À Paris, des véhi­cu­les de trans­port – bus et camions – sont regrou­pés alors que bureau par bureau, les équipements, les archi­ves et res­sour­ces docu­men­tai­res sont iden­ti­fiés et cata­lo­gués en vue du pro­chain démé­na­ge­ment. C’est à partir de mai 1940 que l’exil de l’Administration cen­trale com­mence ; les der­niers per­son­nels quit­tent la rue Balzac le 12 juin au moment où les trou­pes alle­man­des arri­vent aux portes de la capi­tale.
Au tra­vers de dif­fé­ren­tes sour­ces de l’époque et de témoi­gna­ges, cet arti­cle a pour objec­tif de retra­cer l’épopée des archi­ves d’AFC pen­dant cet exil qui débu­tera entre mai et juin 1940. En sep­tem­bre 1943, hormis quel­ques ser­vi­ces, l’essen­tiel de l’effec­tif a rega­gné Paris et l’admi­nis­tra­tion cen­trale est alors com­plè­te­ment recons­ti­tuée. Le site d’Éguilles demeure cepen­dant un dépôt d’archi­ves pour la Compagnie, et ce jusqu’à décem­bre 1963. Cet arti­cle s’inté­resse également au par­cours d’un homme, Jacques Fournier de Lempdes, qui, chargé des archi­ves d’AFC, fut la che­ville ouvrière d’une opé­ra­tion ô com­bien déli­cate et dont la réus­site a fait qu’aujourd’hui, si Pechiney a dis­paru, ses archi­ves his­to­ri­ques demeu­rent.

 Archives audio­vi­suel­les et pro­tec­tion du patri­moine cultu­rel en cas de conflit armé, par Sophie FTULISIAK et le lieu­te­nant Charlélie BERTHAUT
Le monde assiste fré­quem­ment à la des­truc­tion du patri­moine cultu­rel et aux pilla­ges orga­ni­sés en raison de conflits armés. Les enjeux liés à la des­truc­tion, au trafic illi­cite et à la res­ti­tu­tion de biens cultu­rels posent la ques­tion de la pro­tec­tion effec­tive du patri­moine. Les archi­ves se retrou­vent au cœur de ces enjeux. Parmi elles, les archi­ves audio­vi­suel­les pré­sen­tent des spé­ci­fi­ci­tés affec­tant for­te­ment les modes de conser­va­tion, de lec­ture et d’étude, de com­mu­ni­ca­tion et de trai­te­ment juri­di­que, ce qui génère un trai­te­ment dis­tinct de celui des archi­ves tex­tuel­les clas­si­ques. L’his­toire de l’Établissement de com­mu­ni­ca­tion et de pro­duc­tion audio­vi­suelle de la Défense (ECPAD) remonte à la Première Guerre mon­diale et est indis­so­cia­ble des archi­ves qu’il conserve. Elle permet de retra­cer l’épopée des archi­ves audio­vi­suel­les des armées fran­çai­ses à tra­vers les conflits armés du XXe siècle, ce qui cons­ti­tue un pré­cieux témoi­gnage dans le champ de la pro­tec­tion des archi­ves. Elle a d’ailleurs fourni aux équipes de l’ECPAD un retour d’expé­rience indis­pen­sa­ble à l’élaboration d’un plan de pro­tec­tion en cas de conflit armé réa­liste, dont les prin­ci­paux items sont rela­tés.

VF : La lutte pour l’indé­pen­dance de l’Irlande (1916-1922) a entraîné la des­truc­tion de nom­breux docu­ments, y com­pris les archi­ves d’État ras­sem­blant sept siè­cles d’archi­ves irlan­dai­ses. Pourtant, le gou­ver­ne­ment irlan­dais n’a pas inclus ces pertes dans un rap­port impor­tant de l’UNESCO de 1996 sur la des­truc­tion des archi­ves au niveau mon­dial au cours du XXe siècle. Cet arti­cle se penche sur la des­truc­tion acci­den­telle ou déli­bé­rée des archi­ves irlan­dai­ses au cours de cette période, ainsi que sur les ini­tia­ti­ves de récu­pé­ra­tion, depuis les jours qui ont suivi les com­bats jusqu’à la col­la­bo­ra­tion inter­dis­ci­pli­naire actuelle entre his­to­riens, archi­vis­tes et infor­ma­ti­ciens au sein du Virtual Record Treasury of Ireland (Trésor des archi­ves vir­tuel­les d’Irlande). Il démon­tre que la perte d’archi­ves en raison du conflit a eu des consé­quen­ces dif­fé­ren­tes pour la recher­che his­to­ri­que et l’iden­tité cultu­relle dans l’État libre d’Irlande nou­vel­le­ment indé­pen­dant (qui devien­dra plus tard la répu­bli­que) et en Irlande du Nord, qui a main­tenu son appar­te­nance au Royaume-Uni.

Des archi­ves pour témoi­gner : droits indi­vi­duels et mémoire col­lec­tive
 Archives indi­vi­duel­les des vic­ti­mes de guerre de la Seconde Guerre mon­diale : de la reconnais­sance des droits à la valo­ri­sa­tion mémo­rielle et his­to­ri­que. Plongée dans le fonds de la divi­sion des archi­ves des vic­ti­mes des conflits contem­po­rains, par Alain ALEXANDRA
Sur les vingt kilo­mè­tres linéai­res d’archi­ves de vic­ti­mes de guerre conser­vés à la divi­sion des archi­ves des vic­ti­mes des conflits contem­po­rains (DAVCC), antenne caen­naise du Service his­to­ri­que de la Défense, au moins 90 % sont consa­crés à la Seconde Guerre mon­diale. Pour l’essen­tiel, ces archi­ves se pré­sen­tent sous la forme de dos­siers ou de docu­ments indi­vi­duels col­lec­tés ou pro­duits par l’État dans le but de recen­ser, de répon­dre aux besoins des famil­les et d’attri­buer droits et pen­sions à ces der­niè­res ou aux vic­ti­mes sur­vi­van­tes. L’idée d’hono­rer les vic­ti­mes des com­bats et de la bar­ba­rie nazie est à l’ori­gine de ce fonds, mais depuis une tren­taine d’années, his­to­riens, asso­cia­tions et par­ti­cu­liers s’atta­chent à étudier ces archi­ves tant dans le cadre du devoir de mémoire que dans une pers­pec­tive his­to­ri­que plus large, notam­ment pour ana­ly­ser le fonc­tion­ne­ment du sys­tème de répres­sion nazi et de son effet sur la popu­la­tion rési­dant en France.

 L’agent orange, agent de dis­corde, par Marcelle CINQ-MARS
À la fin des années soixante, le gou­ver­ne­ment cana­dien a permis l’uti­li­sa­tion du défo­liant agent orange sur une de ses bases mili­tai­res. Près de deux décen­nies plus tard, les effets nocifs de ce défo­liant furent confir­més et les per­son­nes expo­sées au pro­duit, autant civi­les que mili­tai­res, enta­mè­rent des recher­ches docu­men­tai­res afin de pré­pa­rer un dos­sier de récla­ma­tion envers le gou­ver­ne­ment cana­dien. De son côté, le gou­ver­ne­ment cana­dien a entre­pris sa propre recher­che en archi­ves afin de docu­men­ter les déci­sions prises par les auto­ri­tés gou­ver­ne­men­ta­les de l’époque. Le cas de l’agent orange illus­tre com­ment les archi­ves gou­ver­ne­men­ta­les conser­vées à Bibliothèque et Archives Canada ont permis d’étayer les droits des vic­ti­mes poten­tiel­les.

VF : Préserver les preu­ves liées aux graves vio­la­tions des droits de l’homme est une stra­té­gie clé pour attein­dre la res­pon­sa­bi­lité et pour com­mé­mo­rer les injus­ti­ces pas­sées en vue de trans­for­mer les socié­tés. Au cours des der­niè­res décen­nies, de nom­breu­ses com­mis­sions de vérité et de réconci­lia­tion, des orga­ni­sa­tions de la société civile et des orga­nis­mes gou­ver­ne­men­taux ont docu­menté les vio­la­tions des droits de la per­sonne com­mi­ses dans le cadre de conflits armés et d’oppres­sion poli­ti­que. De vastes quan­ti­tés d’infor­ma­tions prin­ci­pa­le­ment ouver­tes sur les atro­ci­tés ont émergé dans le cadre des conflits syrien et ukrai­nien. L’impor­tance de ces dif­fé­ren­tes archi­ves pour faire face au passé – Vergangenheitsbewältigung – est incontes­ta­ble. Mais les impli­ca­tions pra­ti­ques et poli­ti­ques de l’archi­vage et de la docu­men­ta­tion de la vio­lence poli­ti­que res­tent peu com­pri­ses. Quels sont les choix cura­to­riaux, archi­vis­ti­ques et poli­ti­ques aux­quels sont confron­tées les archi­ves des droits de l’homme ? Comment la docu­men­ta­tion de la vio­lence phy­si­que et struc­tu­relle peut-elle être liée de manière signi­fi­ca­tive à la gué­ri­son socié­tale ? Quel est l’impact de l’aug­men­ta­tion des quan­ti­tés de don­nées sur l’archi­vage des vio­la­tions des droits de l’homme ? Quelles voix et quel­les expé­rien­ces « comp­tent » lors­que la vio­lence est archi­vée ? Que se passe-t-il lors­que la souf­france humaine est trans­for­mée en caté­go­ries judi­ciai­res et bureau­cra­ti­ques ? Et com­ment docu­men­ter la nature de plus en plus trans­na­tio­nale de la vio­lence dans les archi­ves natio­na­les ? Ces ques­tions et d’autres sont explo­rées dans le pré­sent mémoire dans le numéro spé­cial de La Gazette des Archives, sous la forme d’un entre­tien avec Luisa Franco, une archi­viste des droits de l’homme ayant une vaste expé­rience dans l’archi­vage et la pré­ser­va­tion de la vio­lence poli­ti­que. Formée aux tech­no­lo­gies numé­ri­ques, à la conser­va­tion et au patri­moine cultu­rel, elle a été membre du per­son­nel de la Direction des droits de la per­sonne du Centre natio­nal de la mémoire his­to­ri­que de Colombie. Au cours des der­niè­res années, elle a sou­tenu de nom­breu­ses archi­ves docu­men­tant de graves vio­la­tions des droits humains dans des pays aussi divers que l’Égypte, la Libye, le Guatemala, le Honduras et El Salvador. Dans cette inter­view, Luisa Franco réflé­chira à ses expé­rien­ces pro­fes­sion­nel­les et per­son­nel­les, et au rôle des archi­ves dans la ges­tion du passé. L’entre­vue sera menée et éditée par le doc­teur Tobias Hagmann qui a mené des recher­ches à long terme sur la vio­lence poli­ti­que et l’État dans les pays du Sud.

VF : Le 2 avril 1982, une force argen­tine enva­hit les îles Malouines, un ter­ri­toire bri­tan­ni­que d’outre-mer. Trois jours plus tard, le gou­ver­ne­ment bri­tan­ni­que envoie un groupe de tra­vail naval pour repren­dre les îles. Le conflit durera 74 jours et se ter­mi­nera par une red­di­tion argen­tine le 14 juin, ren­dant les îles au contrôle bri­tan­ni­que. The Guardian est l’un des rares jour­naux natio­naux bri­tan­ni­ques à avoir adopté une posi­tion cri­ti­que à l’égard de la guerre. La façon dont le jour­nal a cou­vert le conflit – à la fois les arti­cles de jour­naux publiés et les arti­cles archi­vés tels que les notes éditoriales, les pho­to­gra­phies et les cari­ca­tu­res – est conser­vée dans les archi­ves du Guardian News & Media et dans la biblio­thè­que éditoriale du jour­nal. Cet arti­cle exa­mine des docu­ments, y com­pris une sélec­tion de docu­ments per­son­nels du rédac­teur, qui révè­lent des dis­cus­sions inter­nes concer­nant les dif­fi­cultés ren­contrées par le jour­na­liste du Guardian envoyé pour cou­vrir le conflit. Cela incluait des dif­fi­cultés avec l’armée bri­tan­ni­que et la cen­sure. De même, les archi­ves contien­nent des docu­ments rela­tifs à la cap­ture et à l’empri­son­ne­ment par les Argentins du cor­res­pon­dant de la défense de l’Observer (le Guardian a acheté l’Observer en 1993). Les témoi­gna­ges d’his­toire orale appor­tent un éclairage sup­plé­men­taire sur le pro­ces­sus éditorial pen­dant une guerre, tandis que les notes d’entre­vue per­son­nel­les archi­vées avec des poli­ti­ciens de haut niveau met­tent en lumière la pensée du gou­ver­ne­ment bri­tan­ni­que à l’époque.

Des archi­ves à trai­ter : gestes archi­vis­ti­ques
 Les pro­ces­sus de pro­duc­tion et de ges­tion de l’infor­ma­tion (papier et électronique) dans des contex­tes sin­gu­liers : le cas aty­pi­que des unités de la gen­dar­me­rie pré­vô­tale, par la lieu­te­nante-colo­nelle Sandra SÉRIS avec la col­la­bo­ra­tion d’Éric WARNANT
En ce début de XXIᵉ siècle, avec la mul­ti­pli­ca­tion des conflits inte­ré­ta­ti­ques et de la menace ter­ro­riste, l’enga­ge­ment mili­taire fran­çais à l’étranger est de plus en plus pré­sent. Les unités de la gen­dar­me­rie pré­vô­tale, ins­ti­tuées en temps de paix auprès des forces armées fran­çai­ses, hors du ter­ri­toire natio­nal, sont par­ties inté­gran­tes de tous les théâ­tres d’opé­ra­tion et aux côtés des forces sta­tion­nées ou per­ma­nen­tes répar­ties sur l’ensem­ble du globe. Véritables unités opé­ra­tion­nel­les, leurs prin­ci­pa­les mis­sions relè­vent du péri­mè­tre de la police judi­ciaire aux armées, de la police géné­rale, de l’appui aux forces et du ren­sei­gne­ment. Nous vous pro­po­sons de décou­vrir cet uni­vers aty­pi­que à tra­vers le prisme des pro­ces­sus de pro­duc­tion et de ges­tion de l’infor­ma­tion (papier et électronique) de deux ser­vi­ces pro­duc­teurs évoluant dans des contex­tes de conflits sin­gu­liers. Grâce aux témoi­gna­ges de deux pré­vôts, conso­li­dés par des échanges avec le géné­ral, chef du com­man­de­ment de la gen­dar­me­rie pré­vô­tale (CGP), nous sou­li­gne­rons com­ment la gen­dar­me­rie pré­vô­tale répond aux enjeux majeurs de la bonne sécu­ri­sa­tion et ges­tion de son infor­ma­tion sen­si­ble afin de garan­tir la péren­nité de son patri­moine archi­vis­ti­que et de pou­voir ainsi répon­dre à terme aux sol­li­ci­ta­tions d’ordre judi­ciaire, opé­ra­tion­nel, admi­nis­tra­tif et his­to­ri­que.

 Accès refusé : la trans­pa­rence gou­ver­ne­men­tale et les embû­ches à l’accès à l’infor­ma­tion. Les cas des archi­ves cana­dien­nes de rela­tions inter­na­tio­na­les et du ren­sei­gne­ment étranger, par Melody BÉLAND
Cet arti­cle met en lumière les défis et limi­tes ren­contrés par les ana­lys­tes et archi­vis­tes res­pon­sa­bles de l’accès à l’infor­ma­tion des docu­ments gou­ver­ne­men­taux du Canada, confor­mé­ment à la Loi sur l’accès à l’infor­ma­tion (AIPRP). Plus pré­ci­sé­ment, ce sont les obs­ta­cles tou­chant par­ti­cu­liè­re­ment les docu­ments sur les rela­tions inter­na­tio­na­les. Tout d’abord, l’arti­cle démon­tre que les pre­miers obs­ta­cles varient selon le type de deman­des. Les deman­des trop larges ou vagues sont celles qui néces­si­tent une recher­che en pro­fon­deur et entraî­nent des délais consi­dé­ra­bles. L’arti­cle explore par la suite la néces­sité de déter­mi­ner l’auto­rité sur l’infor­ma­tion conte­nue dans les docu­ments, en par­ti­cu­lier pour les infor­ma­tions étrangères, ce qui entraîne également des délais dus aux consul­ta­tions. Plus encore, l’arti­cle démon­tre que les fac­teurs d’ana­lyse tels que la sen­si­bi­lité et l’âge d’un docu­ment ne sont pas des barè­mes pou­vant être appli­qués uni­for­mé­ment. En conclu­sion, l’arti­cle met en évidence l’impor­tance de réfor­mer les méca­nis­mes exis­tants. Il aborde également la déclas­si­fi­ca­tion proac­tive des docu­ments gou­ver­ne­men­taux, comme étant un moyen d’amé­lio­rer l’accès à long terme en rédui­sant les obs­ta­cles liés à l’accès à l’infor­ma­tion, tout en sou­li­gnant les efforts cons­tants pour pro­mou­voir la trans­pa­rence gou­ver­ne­men­tale malgré les défis ren­contrés.

 Archivistes de l’OTAN, affir­ma­tion d’une iden­tité pro­fes­sion­nelle au cœur des opé­ra­tions de l’Alliance atlan­ti­que, par Barbara VIALLET
À partir des années 1990 et dans le contexte de la fin de la guerre froide, l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) a com­mencé à jouer un rôle actif dans des opé­ra­tions. Soutenus par les pays mem­bres de l’Alliance atlan­ti­que à tra­vers le Comité des archi­ves, les archi­vis­tes de l’OTAN ont mis en place – ou tout au moins aidé à mettre en place dans cer­tains cas – des pro­ces­sus, pro­cé­du­res et outils inhé­rents à la ges­tion des archi­ves opé­ra­tion­nel­les. En cette année 2024 qui marque les 75 années de l’exis­tence de l’Alliance atlan­ti­que, ainsi que le 25e anni­ver­saire des Archives de l’OTAN, l’arti­cle s’inté­resse à l’affir­ma­tion de l’iden­tité pro­fes­sion­nelle des archi­vis­tes de l’OTAN des pre­miè­res opé­ra­tions en Bosnie-Herzégovine aux mis­sions en Afghanistan et au Kosovo. Au sein d’un envi­ron­ne­ment inter­na­tio­nal régi par de stricts prin­ci­pes et règles de sécu­rité, le trai­te­ment, la pro­tec­tion et la mise à dis­po­si­tion des archi­ves opé­ra­tion­nel­les ont lar­ge­ment contri­bué à la pro­fes­sion­na­li­sa­tion des posi­tions d’archi­vis­tes au sein de l’Alliance. Ils ont également mené à une impor­tante impli­ca­tion des archi­vis­tes de l’OTAN dans la recher­che de solu­tions qui garan­tis­sent la conser­va­tion et l’acces­si­bi­lité à long terme des archi­ves sur sup­ports magné­ti­ques et numé­ri­ques, ainsi que dans l’appli­ca­tion des dif­fé­rents méca­nis­mes de mise à dis­po­si­tion d’infor­ma­tions OTAN.

VF : Les États-Unis ont mis en place une agence de ren­sei­gne­ment secrète pour coor­don­ner le déve­lop­pe­ment et l’exploi­ta­tion de leurs satel­li­tes espions pen­dant la guerre froide. La divul­ga­tion publi­que de l’agence et de ses acti­vi­tés a com­mencé peu après la fin de la guerre froide. Ces efforts illus­trent l’évolution des exi­gen­ces amé­ri­cai­nes de déclas­si­fi­ca­tion et de divul­ga­tion publi­que, et l’émergence de nom­breu­ses archi­ves numé­ri­ques et de sites Web asso­ciés qui vien­nent com­plé­ter les col­lec­tions des Archives natio­na­les des États-Unis. Le gou­ver­ne­ment amé­ri­cain pro­pose aujourd’hui un site Web cen­tra­lisé qui faci­lite l’accès à un grand nombre de ces archi­ves.

ARTICLES SUMMARY

Des archi­ves mal­me­nées : dépla­ce­ments, des­truc­tion, recons­ti­tu­tion

 Deliberate des­truc­tion and col­la­te­ral damage : the bur­ning of Irish records 1916-1922, par le doc­teur Ciarán WALLACE
The strug­gle for Irish inde­pen­dence (1916-1922) resul­ted in the des­truc­tion of many records, inclu­ding the state archi­ves contai­ning seven cen­tu­ries of Irish records. Yet the Irish govern­ment did not include these losses in a major 1996 UNESCO report on global archi­val des­truc­tion in the twen­tieth cen­tury. This arti­cle exa­mi­nes the acci­den­tal and deli­be­rate des­truc­tion of Ireland’s archi­ves during this period, and the reco­very efforts, from the days imme­dia­tely after the figh­ting to the cur­rent inter­dis­ci­pli­nary col­la­bo­ra­tion bet­ween his­to­rians, archi­vists and com­pu­ter scien­tists in the Virtual Record Treasury of Ireland. It argues that the loss of records through conflict pro­du­ced dif­fe­rent results for his­to­ri­cal research and cultu­ral iden­tity in the newly inde­pen­dent Irish Free State (later decla­red the repu­blic), and Northern Ireland, which main­tai­ned its union with Britain.

 Archiving vio­lence : a conver­sa­tion with Luisa Franco, par Luisa FRANCO et le doc­teur Tobias HAGMANN
Preserving evi­dence rela­ted to grave human rights abuses is a key stra­tegy to achieve accoun­ta­bi­lity and to memo­ria­lize past injus­ti­ces in view of trans­for­ming socie­ties. In the past deca­des nume­rous truth and reconci­lia­tion com­mis­sions, civil society orga­ni­za­tions and govern­men­tal bodies have docu­men­ted human rights abuses car­ried out as part of armed conflicts and poli­ti­cal oppres­sion. Vast amounts of pre­do­mi­nantly open source infor­ma­tion on atro­ci­ties have emer­ged as part of the Syrian and Ukrainian conflicts. The impor­tance of these dif­fe­rent archi­ves for dea­ling with the past – the pro­ver­bial German Vergangenheitsbewältigung – is undis­pu­ted. But the prac­ti­cal and poli­ti­cal impli­ca­tions of archi­ving and docu­men­ting poli­ti­cal vio­lence remain little unders­tood. Which cura­to­rial, archi­val and poli­ti­cal choi­ces are human rights archi­ves faced with ? How can the docu­men­ta­tion of phy­si­cal and struc­tu­ral vio­lence be mea­ning­fully linked to socie­tal hea­ling ? What is the impact of increa­sing amounts of data on archi­ving human rights vio­la­tions ? Whose voices and expe­rien­ces ‘count’ when vio­lence is archi­ved ? What hap­pens when human suf­fe­ring is trans­for­med into records, judi­cial and bureau­cra­tic cate­go­ries ? And how can the increa­sin­gly trans­na­tio­nal nature of vio­lence be docu­men­ted in natio­nal archi­ves ? These and other ques­tions are explo­red in this sub­mis­sion to the spe­cial issue of La Gazette des Archives taking the form of an inter­view with Luisa Franco, a human rights archive prac­ti­tio­ner with exten­sive expe­rience in archi­ving and pre­ser­ving poli­ti­cal vio­lence. Trained in digi­tal tech­no­lo­gies, conser­va­tion and cultu­ral heri­tage, she was a former staff in the Human Rights Directorate of Columbia’s National Centre for Historical Memory. Over recent years she has sup­por­ted nume­rous archi­ves docu­men­ting grave human rights vio­la­tions in coun­tries as diverse as Egypt, Libya, Guatemala, Honduras and El Salvador. In this inter­view Luisa Franco will share and reflect on her pro­fes­sio­nal and per­so­nal expe­rien­ces on the role of archi­ves in dea­ling with the past. The inter­view will be conduc­ted and edited by Dr. Tobias Hagmann who has conduc­ted long-term research on poli­ti­cal vio­lence and the state in the global South.

 “An unex­pec­ted chal­lenge” : how The Guardian repor­ted the Falklands war, par Richard NELSSON
On 2nd April 1982, a force from Argentina inva­ded the Falkland Islands, a British over­seas ter­ri­tory. Three days later, the UK govern­ment sent a naval task­force to take back the islands. The conflict lasted 74 days and ended with an Argentine sur­ren­der on 14 June, retur­ning the islands to British control. The Guardian was one of a small number of British natio­nal news­pa­pers to take a cri­ti­cal stance towards the war. How the paper cove­red the conflict – both publi­shed news­pa­per reports and archi­ved items such as edi­to­rial memos, pho­to­graphs and car­toons – are pre­ser­ved in the Guardian News & Media archive, and the paper’s edi­to­rial library. This paper looks at docu­ments, inclu­ding a selec­tion of the editor’s per­so­nal papers, that reveal inter­nal dis­cus­sions regar­ding the hard­ships expe­rien­ced by the Guardian repor­ter sent to cover the conflict. These inclu­ded dif­fi­culties with the British mili­tary and cen­sor­ship. Likewise, the archive holds mate­rial rela­ting to the cap­ture and impri­son­ment by the Argentinians of the Observer’s defence cor­res­pon­dent (the Guardian bought the Observer in 1993). Oral his­tory tes­ti­mo­nies bring an extra insight into the edi­to­rial pro­cess during a war, while archi­ved per­so­nal inter­view notes with senior poli­ti­cians shed light on the British govern­ment’s thin­king at the time.

 U.S. Cold War Espionage Satellites, Public Disclosure, and Digital Archives, par Jeffery CHARLSTON
The U.S. esta­bli­shed a secret intel­li­gence agency to coor­di­nate deve­lop­ment and ope­ra­tion of its Cold War intel­li­gence satel­li­tes. Public dis­clo­sure of both the agency and its acti­vi­ties began shortly after the end of the Cold War. Those efforts illus­trate the deve­lop­ment of U.S. declas­si­fi­ca­tion and public dis­clo­sure requi­re­ments, and the emer­gence of mul­ti­ple digi­tal archi­ves and rela­ted web­si­tes sup­ple­men­ting the col­lec­tions of the U.S. National Archives. The U.S. govern­ment now ope­ra­tes a cen­tral web­site faci­li­ta­ting access to many of those records.

Collection associée

Utilisez la fonctionnalité “rechercher” du site

La Gazette des archives publie des articles et des études approfondies sur les évolutions et les enjeux du métier d’archiviste, offrant ainsi une source d’information essentielle pour les professionnels du secteur.
Les numéros, y compris ceux des années antérieures, peuvent être acquis sur abonnement ou à l’unité.

Toutes nos publications