La Gazette des archives n°276

Appel à contributions « Les publics des archives : entre représentations et innovation(s) »

Rédaction de la Gazette des archives   vendredi 2 mai 2025
  • Imprimer

En 2011, dans La Gazette des archi­ves, Franck Burckel s’inter­ro­geait sur les évolutions des usages et des publics des archi­ves. En 2012, les ren­contres annuel­les de la sec­tion des archi­vis­tes dépar­te­men­taux (Rasad) s’inté­res­saient aux nou­veaux usa­gers (Nouveaux usages..., 2012). En 2022, le sémi­naire annuel des Archives de France offrait une Carte blan­che « Les publics au cœur de la poli­ti­que des archi­ves » (Service inter­mi­nis­té­riel des Archives de France – Siaf –, 2022). Plusieurs enquê­tes natio­na­les ont été menées, notam­ment par le Siaf (Guigueno, 2016 ; Observatoire des publics), pour essayer de saisir ces évolutions. Récemment deux pro­gram­mes de recher­che uni­ver­si­tai­res sou­te­nus par le Siaf ont appro­ché la ques­tion du public, l’un inti­tulé « Les reconfi­gu­ra­tions du tra­vail des archi­ves : tra­jec­toi­res, rap­port au tra­vail et légi­ti­mi­tés des archi­vis­tes face à l’infor­ma­ti­sa­tion d’un monde pro­fes­sion­nel » (Université de Caen, Moalic-Minnaert et al., 2024), l’autre « Reconfiguration des rap­ports aux usa­gers » (Université d’Angers, Reconfigurations..., 2022-2025).

Le numéro thé­ma­ti­que sou­haite appré­hen­der cette ques­tion en envi­sa­geant à la fois les repré­sen­ta­tions que se font les archi­vis­tes de leur public, les objec­tifs qu’ils se fixent en la matière, ainsi que les outils et stra­té­gies conçus en consé­quence, ima­gi­nés, déployés, par­fois géné­ra­li­sés. Comment les ser­vi­ces connais­sent-ils ou pré­sup­po­sent-ils leur(s) public(s) ? Quels choix font-ils ? Appuyés sur quels fon­de­ments archi­vis­ti­ques, quel­les repré­sen­ta­tions et pour quelle poli­ti­que ? Pensant leur rap­port aux usa­gers prin­ci­pa­le­ment en termes de besoins d’infor­ma­tion, com­ment opè­rent-ils l’adap­ta­tion de leur(s) offre(s) ? Avec quels dis­po­si­tifs théo­ri­ques ou tech­ni­ques est-il pos­si­ble d’arti­cu­ler une adé­qua­tion plus effi­ciente et adap­ta­tive de l’offre à la demande ?
Les pro­po­si­tions pour­ront s’ins­crire dans les axes qui sui­vent et devront concer­ner les publics exter­nes. Pour l’ensem­ble de ces axes, des appro­ches com­pa­ra­ti­ves entre public des archi­ves et public d’autres sec­teurs cultu­rels, entre offres des ser­vi­ces d’archi­ves et offres d’autres ins­ti­tu­tions, sont bien­ve­nues, de même que des études por­tant sur d’autres pays que la France.

Axe 1 - Publics rêvés, publics cons­ta­tés
Depuis les années 1960, le public n’a cessé d’être seg­menté, stra­ti­fié avec un aban­don pro­gres­sif d’une vision glo­bale pour pri­vi­lé­gier une appro­che par la diver­sité des par­cours au risque d’une dis­per­sion (Marcilloux, 2022). Le concept a pu être concur­rencé par une appré­hen­sion plus admi­nis­tra­tive de la demande avec le terme d’usager à partir des années 1980, l’usager ne pou­vant être réduit à la « clien­tèle » qui fré­quente la salle de lec­ture ou le site Internet (Peignet, 2001). L’exis­tence de caté­go­ries est jus­ti­fiée par la volonté de mieux iden­ti­fier des besoins et des atten­tes spé­ci­fi­ques. Ces caté­go­ries n’ont cessé d’évoluer, tra­dui­sant ainsi la manière dont la pro­fes­sion se repré­sente son public. Quelles sont les figu­res du public et de l’usager (Chevallier, 2018) mobi­li­sées ? Avec quel­les atten­tes et quels résul­tats ? Comment et sous quel­les impul­sions ces caté­go­ries évoluent-elles ? Quelle est leur dimen­sion heu­ris­ti­que ? Au-delà des publics sou­hai­tés – ceux que l’on veut faire (re)venir en salle de lec­ture –, com­ment appré­hende-t-on et avec quels outils les publics cons­ta­tés ? On pourra ici s’inté­res­ser à la fabri­que et dif­fu­sion des enquê­tes et des sta­tis­ti­ques en France ou à l’étranger, à ce qu’en dit la lit­té­ra­ture pro­fes­sion­nelle (sin­gu­liè­re­ment les revues d’archi­vis­ti­que). Des études à une échelle réduite (un ser­vice, un ter­ri­toire) ou à l’échelle d’un pays sont aussi atten­dues.

Axe 2 - D’une logi­que de l’offre à une logi­que de la demande ?
La mul­ti­pli­ca­tion des enquê­tes témoi­gne d’une volonté de passer d’une logi­que de l’offre à une logi­que de la demande. Il s’agit tout à la fois de se mettre à l’écoute des besoins des usa­gers mais aussi, en les seg­men­tant, d’iden­ti­fier des besoins par­ti­cu­liers. Dans les deux cas, la démar­che induit de passer d’une logi­que pres­crip­tive au ser­vice d’un inté­rêt géné­ral à des pro­po­si­tions adap­tées aux com­por­te­ments obser­vés ou sup­po­sés. Cette ques­tion se pose d’une manière par­ti­cu­lière dans les ser­vi­ces d’archi­ves, tant publics que privés, qui doi­vent répon­dre à des besoins divers (pro­fes­sion­nels, de loi­sirs, admi­nis­tra­tifs, cultu­rels, éducatifs…) et à des logi­ques d’usage variées et peu étudiées (Grailles et al., 2020). Quels sont les dis­po­si­tifs mis en place pour écouter la parole des usa­gers ? Comment les ser­vi­ces d’archi­ves négo­cient-ils, entre injonc­tions des tutel­les, effets de mode et besoins objec­ti­vés, l’élaboration et la mise en œuvre de poli­ti­ques à des­ti­na­tion du public ? Quels sont les freins et les limi­tes ? Comment gérer la ten­sion entre un public qui cher­che une infor­ma­tion ponc­tuelle et un public plus inten­sif, entre ser­vi­ces à la demande et outils d’auto­no­mi­sa­tion de l’usager (Reconfigurations…, 2022-2025) ? Quel déca­lage entre les inten­tions, les stra­té­gies et la réa­lité de ter­rain ?
On pourra notam­ment s’inté­res­ser à la manière dont ces ques­tions sont réflé­chies à l’occa­sion de la mise en place de pro­jets scien­ti­fi­ques, cultu­rels, éducatifs et admi­nis­tra­tifs de ser­vi­ces d’archi­ves, ainsi qu’à toutes les ini­tia­ti­ves inno­van­tes dans ce domaine. On pourra également envi­sa­ger la manière dont les poli­ti­ques d’offre des ser­vi­ces d’archi­ves sont per­çues par des com­mu­nau­tés d’uti­li­sa­teurs. En Amérique du nord et dans les pays anglo­pho­nes, la fonc­tion d’archi­viste de réfé­rence (refe­rence archi­vist) est iden­ti­fiée (Brisson et al., 2022). Est-ce que cette fonc­tion n’aurait pas inté­rêt à être mieux iden­ti­fiée au sein des ser­vi­ces d’archi­ves ?

Axe 3 - Ajuster les espa­ces phy­si­ques et vir­tuels, inves­tir le ter­ri­toire
Depuis une ving­taine d’années, les espa­ces d’accueil et d’échange avec le public se sont mul­ti­pliés tant en pré­sen­tiel qu’en ligne. Les bâti­ments se trou­vent par­fois dotés de salles de lec­ture pen­sées selon des moda­li­tés et des inten­si­tés de fré­quen­ta­tion qui ont évolué. La spé­cia­li­sa­tion des espa­ces n’a cessé de s’accen­tuer. Ils accueillent clas­si­que­ment des ate­liers à des­ti­na­tion des sco­lai­res, des confé­ren­ces ou des expo­si­tions, mais une demande existe pour des acti­vi­tés plus infor­mel­les, plus étendues ou déca­lées (« tiers-lieux archi­vis­ti­ques » à défi­nir). Parallèlement de nou­veaux espa­ces d’échange ou de ren­sei­gne­ment en ligne émergent : chat­bot, chat, espace mul­ti­ca­nal (via des logi­ciels de ges­tion des rela­tions aux usa­gers). Quelles arti­cu­la­tions et quel­les spé­cia­li­sa­tions pour ces dif­fé­rents espa­ces ? Quelles com­pé­ten­ces pour y répon­dre ? Quelle réor­ga­ni­sa­tion fonc­tion­nelle pour les ser­vi­ces ? La ques­tion des salles de lec­ture vir­tuel­les comme média de dif­fu­sion per­son­na­li­sée, celle de la numé­ri­sa­tion à la demande, sont paral­lè­le­ment à l’ordre du jour. Comment les orga­ni­ser ? Avec quels objec­tifs et quelle sou­plesse dans le péri­mè­tre et les répon­ses ?
Parallèlement d’autres lieux se sont créés hors des ser­vi­ces d’archi­ves. Nous lais­se­rons ici de côté l’offre com­mer­ciale exis­tante pour nous inté­res­ser aux com­mu­nau­tés déve­lop­pées sur face­book ou ins­ta­gram, mais aussi aux injonc­tions d’inves­tir le ter­ri­toire. Quelle place pour les ser­vi­ces d’archi­ves et les archi­vis­tes dans ces cadres ? Quels col­la­bo­ra­tions et par­te­na­riats hors des murs avec d’autres réseaux (biblio­thè­ques, inter­com­mu­na­li­tés, tiers-lieux par exem­ple) ?

Modalités de contri­bu­tion et d’évaluation

Il est conseillé aux per­son­nes dési­reu­ses de sou­met­tre une contri­bu­tion dans le cadre de ce dos­sier de pren­dre contact au préa­la­ble avec les coor­di­na­teurs du numéro : bene­dicte.grailles[at]univ-angers.fr ; patrice.mar­cilloux[at]univ-angers.fr ; bri­gitte.gui­gueno[at]culture.gouv.fr ; camille.rouf­faud[at]univ-angers.fr

Une pre­mière sélec­tion aura lieu à partir des résu­més d’une lon­gueur de 3000 signes indi­quant un titre de pro­po­si­tion, le type de contri­bu­tion (arti­cle ori­gi­nal, pistes et pers­pec­ti­ves, entre­tien, étude de cas et compte rendu), un ancrage théo­ri­que, la métho­do­lo­gie pré­cise qui sera déve­lop­pée dans le texte et l’axe ou les axes concer­nés.

Les contri­bu­tions atten­dues peu­vent être de dif­fé­ren­tes natu­res :
Article ori­gi­nal (5 000 à 10 000 mots hors annexes et notes de bas de page) : publi­ca­tion ori­gi­nale pré­sen­tant un propos argu­menté, démon­tré et étayé par une ana­lyse de la lit­té­ra­ture et des sour­ces (archi­ves, enquête...).
Pistes et pers­pec­ti­ves (5 000 à 10 000 mots hors annexes et notes de bas de page) : arti­cle qui peut adop­ter un ton plus spé­cu­la­tif et expri­mer une réflexion nova­trice sur la théo­rie ou la pra­ti­que archi­vis­ti­que.
Entretien (lon­gueur des entre­tiens à conve­nir avec le comité de rédac­tion) : entre­tien inédit avec une per­son­na­lité, pré­sen­tant un apport pour la théo­rie ou la pra­ti­que archi­vis­ti­que.
Étude de cas (4 000 à 7 000 mots hors annexes et notes de bas de page) : retour d’expé­rience ana­ly­ti­que sur un projet ou une acti­vité qui pré­sente un carac­tère ori­gi­nal et apporte une réflexion sur la pra­ti­que archi­vis­ti­que.
Compte rendu (1000 à 2 000 mots hors notes de bas de page) : compte rendu pro­blé­ma­tisé d’un ouvrage ou d’un événement scien­ti­fi­que qui pré­sente des réflexions archi­vis­ti­ques.

Les pro­po­si­tions de contri­bu­tion feront l’objet d’une évaluation en double aveu­gle avec suivi par le comité éditorial de la revue La Gazette des archi­ves.

Responsables du numéro thé­ma­ti­que :
Bénédicte Grailles, maî­tresse de confé­ren­ces en archi­vis­ti­que à l’uni­ver­sité d’Angers ;
Brigitte Guigueno, adjointe au sous-direc­teur du pilo­tage, de la com­mu­ni­ca­tion et de la valo­ri­sa­tion des archi­ves au Service inter­mi­nis­té­riel des Archives de France ;
Patrice Marcilloux, pro­fes­seur des uni­ver­si­tés en archi­vis­ti­que à l’uni­ver­sité d’Angers ;
Camille Rouffaud, doc­to­rante en archi­vis­ti­que à l’uni­ver­sité d’Angers.


Bibliographie

Burckel (Franck), 2011. « Nouveaux usages, nou­veaux publics pour les Archives ». L’archi­viste dans la cité, La Gazette des archi­ves, n°222, 2011, p. 139-147. DOI : https://doi.org/10.3406/gazar.2011.4820

Brisson (Estelle), Morel (Sophie), Roy (Julie), 2022. « La réfé­rence et l’aide aux usa­gers aux Archives natio­na­les du Québec : regard sur un ser­vice en cons­tante évolution », Archives, vol. 50, p. 31-52.

Chevallier (Jacques), 2018. « Les figu­res de l’usager dans les réfor­mes de moder­ni­sa­tion des ser­vi­ces publics », Informations socia­les, n° 198, p. 48-56.

Couillard (Noémie), Nouvellon (Maylis), 2024. L’avenir de la consul­ta­tion des archi­ves dans la recher­che uni­ver­si­taire, 103 p. [en ligne] ainsi que les résul­tats de l’enquête, dis­po­ni­ble sur https://fran­cear­chi­ves.gouv.fr/fr/arti­cle/763470835.

Grailles (Bénédicte), Marcilloux (Patrice), 2020. « Pour une archi­vis­ti­que sociale : esquisse d’un bilan de dix ans de recher­che en archi­vis­ti­que à l’Université d’Angers », Archives, n° 49, p.37-56.

Guigueno (Brigitte), 2016. « Le public des archi­ves et ses contras­tes, au crible de plu­sieurs enquê­tes », Les muta­tions du métier d’archi­viste et de son envi­ron­ne­ment. Actes du 11e col­lo­que natio­nal des archi­vis­tes com­mu­naux et inter­com­mu­naux 2-4 juin 2015 (Limoges), La Gazette des archi­ves, n°244, p. 173-182.

Marcilloux (Patrice). 2022. Le concept de public : en a-t-on encore besoin ? (conclu­sions de la Carte blan­che « Les publics au cœur de la poli­ti­que des archi­ves », sémi­naire annuel des Archives de France à Troyes).

Moalic-Minnaert (Maëlle), Marche (Hélène), Rivron (Vassili), Seiller (Pauline), 2024. Une réforme numé­ri­que ? Les muta­tions du tra­vail archi­vis­ti­que dans les ser­vi­ces d’archi­ves, 156 p. dis­po­ni­ble sur https://fran­cear­chi­ves.gouv.fr/fr/arti­cle/689545291.

Nouveaux usages, nou­veaux usa­gers : quels conte­nus, quels ser­vi­ces allons-nous offrir ? 2012. La Gazette des archi­ves, n°227.

« Observatoire des publics », Service inter­mi­nis­té­riel des Archives de France, dis­po­ni­ble sur https://fran­cear­chi­ves.gouv.fr/fr/sec­tion/677895574.

Reconfiguration des rap­ports aux usages [pro­gramme de recher­che, uni­ver­sité d’Angers], 2022-2025, dis­po­ni­ble sur https://fran­cear­chi­ves.gouv.fr/fr/arti­cle/689545690 ainsi que la jour­née d’étude

Réinventer les rela­tions aux usa­gers, 2024, dis­po­ni­ble sur https://www.you­tube.com/chan­nel/UCpxB8dyBriecybNWEZxQInA et la car­to­gra­phie des ser­vi­ces pro­po­sés par les archi­ves dépar­te­men­ta­les, dis­po­ni­ble sur https://heu­rist.huma-num.fr/heu­rist/?db=2RU&web­site=717.

Peignet (Dominique), 2001. « La biblio­thè­que entre muta­tion de l’offre et muta­tion de la demande », BBF, n° 4, p. 10-17.

Service inter­mi­nis­té­riel des Archives de France, 2022. Carte blan­che « Les publics au cœur de la poli­ti­que des archi­ves », sémi­naire annuel des Archives de France à Troyes, 28-30 sep­tem­bre 2022, dis­po­ni­ble sur https://fran­cear­chi­ves.gouv.fr/fr/arti­cle/689164496

Calendrier

Réception des résumés : 11 juin 2025
Notification d’acceptation des contributions : 20 juin 2025
Réception des contributions complètes : 1er septembre 2025
Publication prévue en mars 2026



 Documents à télécharger


(PDF – 351.1 kio)
        

(Word – 18.2 kio)
        
Retour en haut de la page